Depuis le décès du pape François, l’Église catholique vit un temps singulier :
le Sede vacante. Ce temps, bien qu’empreint de silence et d’attente, n’est pas une vacance de pouvoir spirituel : le Christ, Tête invisible de l’Église (cf. Col 1,18), continue de la guider. Structuré par le droit (Universi Dominici Gregis), ce moment est aussi un acte de foi : c’est Dieu, et non les hommes, qui désigne, par l’élection ecclésiale, celui qu’il veut pour paître son troupeau.
Trois questions peuvent être posées :
· les cardinaux élisent-ils un Pape ou l’évêque de Rome ? La réponse est double : théologique et canonique. En réalité, c’est l’élu comme évêque de Rome qui devient Pape et non l’inverse (cf. Lumen Gentium, 22-23). Dès l’instant où l’élection est valide, l’élu devient Souverain Pontife, Successeur de Pierre, Vicaire du Christ (cf. can. 332 §1).
· Pourquoi seuls les cardinaux votent-ils ? Parce qu’ils représentent juridiquement le clergé de Rome, en vertu du titre cardinalice qui les lie à une église (titulus ou diaconia) romaine. Ainsi, au moment de l’élection, c’est l’Église locale de Rome qui, conformément à une tradition ancienne remontant à saint Cyprien et saint Augustin, choisit son Pasteur. Lequel, de fait, devient le Pape de tous. Le lien est immédiat et organique. Ainsi, le Habemus Papam n’est pas qu’une annonce médiatique, mais l’accueil par les fidèles romains de leur évêque, devenu « Pontife de l’univers ».
· L’élection du Pape est-elle conditionnée par des calculs géopolitiques ? Non, elle n’est pas influencée par les logiques géopolitiques, idéologiques ou identitaires. L’Église ne se laisse pas enfermer dans des catégories humaines : elle est par nature, universelle et reconnaît en chaque baptisé un frère ou une sœur, indépendamment de son origine (cf. Gal 3,28). Dès lors, il ne convient pas d’imaginer un pape européen, africain ou asiatique par souci de représentativité ; mais bien de croire que Dieu appelle qui Il veut, d’où Il veut, selon les besoins de son Église. Le conclave, avec sa rigueur canonique et sa profonde dimension spirituelle, demeure un lieu de discernement : il s’agit de choisir un chrétien bon et vrai. Chaque vote est déposé devant Dieu, et s’accompagne d’une déclaration solennelle de conscience :
« Je prends à témoin le Christ Seigneur qui me jugera, que je donne mon vote à celui que, devant Dieu, je crois devoir être élu. »
En définitive, ce choix dépasse les calculs humains. Il engage toute l’Église à prier, à espérer et à demeurer docile à l’Esprit Saint qui fait toute chose nouvelle (cf. Ap 21,5).