Ce récit au bord du lac, qui commence gentiment, finit très vite par être explosif.
En effet, le pauvre Jésus ne peut enseigner au bord du rivage, à cause de la densité de la foule qui le presse, ne l’entend pas bien. Il demande donc à Pierre de lui fabriquer une chaire : son bateau à quelques mètres du rivage ; ce que Pierre, malgré la fatigue et la déception de la pêche nocturne (pas un poisson !) accepte bien volontiers. N’oublions pas que Jésus a guéri sa belle-mère.
C’est alors que le récit bascule : « Simon, avance au large et jette les filets. ».
Contrairement à ce qu’on lit dans certains commentaires, Simon n’est pas offusqué que Jésus lui demande de faire ce que ne fait jamais aucun professionnel de la pêche : jeter les filets en plein jour (car le poisson voit le filet et se cache). Au contraire, « Maître (epistatè, c’est quelqu’un de statut supérieur), sur ta parole, je fais jeter les filets. »
Il arrive que notre acte de foi naisse de la puissance et la bienveillance de Dieu à notre égard. Ici c’est exactement le contraire. Pêcher de jour, cela ne se fait pas, mais si c’est toi qui le demandes, je vais le faire (et persuader mes compagnons de venir avec moi).
Les évangiles regorgent d’actes de foi qui émeuvent Jésus, et qui manifestement ont le pouvoir de libérer sa puissance généreuse :
– « Venez et vous verrez. » « Ne crains pas, crois seulement. »
– « Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
– « Ta foi t’a sauvé. » Aussitôt il recouvra la vue.
– « Tout ce que vous demanderez en priant, croyez que vous l’avez reçu, et vous le verrez s’accomplir. »
Tous furent « pris d’effroi », abasourdis. Et Simon se sent pêcheur, impur, indigne. Nous est-il arrivé, nous aussi, d’éprouver cela ? Il ne s’agit pas de peur mais d’un sentiment surnaturel, devant la puissance mais aussi la bonté et la générosité. Alors, laissant tout, ils le suivirent. En pleine confiance.
Dans les années 30, un prêtre berlinois, Bernhard Lichtenberg, enseignait ceci : Les hommes disent à Dieu : « Montre-nous des miracles, et nous croirons ! » Et Dieu leur répond : « Croyez, et vous verrez des miracles ! »