Commentaire d’évangile

Commentaire d’évangile

Dimanche 26 février 2023

1ER Dimanche de carème

Évangile selon St Matthieu 4 1-11

Commentaire

Les évangiles nous rapportent deux récits des tentations : l’un situé avant l’inauguration de la vie publique de Jésus, l’autre situé avant l’entrée dans sa Passion. Les tentations au désert et l’acceptation de la croix dans le jardin de Gethsémani sont deux temps essentiels pour Jésus. Doit-il accepter jusqu’à la mort sa vocation ou y renoncer ?

Etre le Messie, le Fils de Dieu, qu’est-ce que cela signifie ?

Sur la Croix où humainement il parait avoir échoué, on se moque de lui : « Toi qui détruis le temple et le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même si tu es le Fils de Dieu et descend de la croix… Il est Roi d’Israël, qu’il descende de sa croix et nous croirons en lui… Il a mis sa confiance en Dieu, que Dieu le délivre maintenant s’il l’aime, car il a dit ‘Je suis Fils de Dieu’ » Mt 27,40-43.

Toute la vie de Jésus est un immense combat entre vérité et mensonge, un choix entre la vie divine et la mort.

La tentation :

La religion ne doit-elle pas faire notre bonheur à n’importe quel prix, même parfois par la force en exerçant un pouvoir absolu, une emprise totale sur notre liberté fondamentale et notre conscience humaine?

« Que ces pierres deviennent du pain » : Il serait tentant d’être un gourou séduisant, en réduisant la religion à un merveilleux spectacle médiatique, qui combine le miracle magique et une réussite facile. On n’aurait plus besoin des autres pour assouvir, par exemple, notre désir de pain (l’agriculteur qui plante le blé, le meunier, le boulanger).

On serait maître de sa vie, on deviendrait un dieu tout puissant. Toute faim aurait disparue, comblée par la satisfaction immédiate de tous nos appétits, de nos désirs les plus fous. Plus nous accumulerions des richesses, plus nous consommerions, plus nous serions heureux, indépendants et libres.

« Jette-toi en bas …car il est écrit … Les anges… te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre ». Qui n’a pas eu peur de la mort à un moment donné ? Qui n’a pas souhaité au moins une fois ne pas mourir ? La chirurgie et les cosmétiques ne peuvent que masquer les outrages du temps, la cryogénie humaine veut répondre au rêve d’immortalité, de toute puissance. Nous n’acceptons pas notre limite de créature. La foi n’est pas une assurance tout-risque qui permettrait d’éviter la mort. Dieu seul est immortel.

Le diable

Celui qui divise remet en cause l’identité de Jésus : « Si tu es le fils de Dieu ».

Il pourrait se prévaloir de ce titre pour lui-même, pour jouir en toute indépendance de ce qui est en réalité un don du Père. Cette tentation rappelle celle du jardin d’Eden. Le serpent invitait le premier couple à se méfier de Dieu et de sa parole : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas ! Mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » (Gen.3,4-5)

Dans les deux premières tentations, le diviseur tente de dialoguer avec Jésus en s’adressant à lui « Si tu es Fils de Dieu ». Le motif invoqué par le diable n’est pas faux, Jésus est bien fils de Dieu, mais les conséquences qu’il en tire sont erronées et constituent la tentation.

Contrairement à la femme de la Genèse, Jésus n’entre pas dans le jeu du dialogue. Il ne lui répond pas, l’ignore car ils  n’ont rien en commun. Jésus cite l’Ecriture pour se référer à Dieu son Père « Il est écrit… ».

On ne doit pas exiger un miracle, tenter de mettre Dieu à son service, marchander par exemple une réussite quelconque en échange de prières. Il reste souverainement libre, et Jésus se reconnait Fils du Père.

Le diable, aussi rusé que le serpent de la Genèse, connaît bien l’Ecriture et, au v. 6, il reprend la méthode de citation scripturaire utilisée par Jésus pour mieux le piéger. Il l’utilise de manière erronée en sortant les versets de leur contexte en les tronquant, il les lit de manière fondamentaliste et ainsi, Il met l’Ecriture à son service en la pervertissant.

Origène commente ce verset en écrivant : « Ô diable, tu lis les livres saints non pour devenir toi-même meilleur ; mais pour tuer au moyen de la lettre ceux qui sont amis de la Parole ». Cette tentation reste d’une étonnante actualité.

La tentation fondamentale est de se poser en rival de Dieu, de devenir dieu.

Jésus rappelle les préceptes fondamentaux qui ont guidé toute sa vie : « L’homme vit… de toute parole qui sort de la bouche de Dieu… Tu ne mettras pas Dieu à l’épreuve ».

Jésus Fils de Dieu.

Le diable, « prince de ce monde » (Jn 12,31) propose alors à Jésus de lui transmettre toute sa puissance, tout son pouvoir, la domination absolue, l’emprise totale sur les êtres et les choses. Jésus serait alors revêtu d’une gloire et d’un pouvoir messianique royal.

– Pour cela, juste une petite condition v.9 : « si tombant à mes pieds tu te prosternes devant moi ».

De qui deviendra-t-il le fils s’il accepte cette proposition ? Jésus ne sera plus Fils de Dieu, mais Fils du diable.

Alors, pour la première fois Jésus s’adresse à lui pour le chasser avant de citer la parole fondatrice et fondamentale de l’Ecriture : « C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte ».

Etre Fils de Dieu,

1 – C’est reconnaître que nous ne sommes pas maîtres de notre origine ni de notre fin. Nous recevons la vie.

Dans l’Esprit de Dieu reçu à notre baptême, celui-là même qui a conduit Jésus dans le désert, nous nous reconnaissons fils.

Comme nous, Jésus fut tenté toute sa vie. Le combat avec le diable a trouvé son terme avec sa mort et sa résurrection.

Sa victoire sur la mort manifestée le jour de Pâques est bien la preuve que la Parole de Dieu, Notre Père, est la vraie Parole de vie. Elle seule peut combler la faim et la soif d’un désir d’absolu qui nous pousse au-delà de nous-mêmes.

Ce que nous sommes est un don qui se reçoit et se vit  dans une dépendance filiale.

A l’imitation du Christ qui a renoncé à la volonté de puissance pour servir, nous ne pouvons nous reconnaître Fils que dans le service de nos frères, l’accueil, et non dans le pouvoir de la domination. « Jésus, de condition divine, n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu. Il s’est dépouillé prenant la condition de serviteur » (Phil 2,6)

2 – C’est nous reconnaître, comme des enfants, dépendants de Notre Père.

3 – C’est accueillir sa vie avec foi et confiance, reconnaître ses dons, se laisser guider par son Esprit :

« Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié,

Que Ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel »

Texte de Mt 4, 1-11

01 En ce temps-là, Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable.

02 Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.

03 Le tentateur s’approcha et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. »

04 Mais Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »

05 Alors le diable l’emmène à la Ville sainte, le place au sommet du Temple

06 et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »

07 Jésus lui déclara : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

08 Le diable l’emmène encore sur une très haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire.

09 Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai, si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. »

10 Alors, Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! Car il est écrit : C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte. »

11 Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s’approchèrent, et ils le servaient.