Commentaire d’évangile

Commentaire d’évangile

3ème dimanche de Pâques

23 avril 2023

Évangile selon saint Luc (24, 13-35)

Dimanche dernier, nous avons écouté des récits d’apparitions de Jésus ressuscité aux disciples, notamment à Thomas qui voulait voir pour croire. Jésus lui dit : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » Jn 20, 29.

S’il est vrai que Jésus est ressuscité, qu’il est vivant, pourquoi ne le voyons-nous pas, ne le touchons nous pas ?

Aujourd’hui, l’évangéliste Luc nous propose un itinéraire de foi, comment devient-on croyant ?

L’introduction, v 13-16 :

 « Le même jour » celui du grand matin de Pâques, deux hommes marchent depuis Jérusalem vers Emmaüs en évoquant l’actualité. Ce verbe « marcher » est très important dans l’évangile. La vie de Jésus peut être considérée comme une marche qui aboutit à Jérusalem. Aujourd’hui, les disciples tournent le dos à cette ville et un inconnu les accompagne : « Jésus marchait avec eux » v. 15.

Ces deux hommes nous ressemblent comme des frères.

La forme passive du v. 16 « leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître » suggère notre faiblesse humaine. Luc prépare l’ouverture des yeux du v.31. 

Les événements vus par les disciples v. 17-24.

La question en apparence banale de Jésus v. 17 provoque leur arrêt « tout tristes ». Il les invite en réalité à relire les événements qu’ils viennent de vivre.

Le dialogue s’engage et Cléophas v. 18 se montre légèrement agressif. Il résume la vie de Jésus et les événements importants avec exactitude et de façon objective. « Nous espérions » v. 21. Ils avaient mis toute leur espérance dans ce prophète qui, notamment, les délivrerait de l’occupation romaine. Maintenant qu’il est mort, leur avenir est fermé, ils tournent le dos à Jérusalem. Le récit des femmes ou de quelques compagnons aurait pu faire naître une lueur d’espoir, « mais lui, ils ne l’ont pas vu » v. 24. Leur déception est immense. Pour ces juifs, l’affaire est grave : Dieu, pourrait-il être encore le Dieu de leurs pères s’il avait ressuscité Jésus condamné, à juste titre, par les grands prêtres pour blasphème ? Jésus est témoin de leur désarroi et les écoute.

Nous lecteurs, nous comprenons qu’ils ont une bonne connaissance des événements, mais ce savoir est méconnaissance. Ils savent tout sur Jésus, mais n’ont rien compris de lui. Nous pouvons dire qu’ils connaissent « le comment » des événements, mais pas leur « pourquoi ».

Les événements expliqués par Jésus v.25-27.

Jésus réagit vivement et les réprimande. Il ne leur reproche pas de ne pas l’avoir reconnu, mais, l’accusation porte sur leur lenteur à croire l’Ecriture.

« Ne fallait-il pas que le Christ souffrit pour entrer dans sa gloire ? ». Cette réponse centrale ne renvoie pas à une exigence d’un dieu pervers. La lecture de l’Ecriture depuis Moïse éclaire le destin de Jésus : Ne fallait-il pas que le Christ accomplisse jusqu’au bout sa vocation pour nous révéler l’amour divin ? En effet, il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Dans la foi, tout s’éclaire, mais dans le doute tout reste obscur. Luc ne nous dit pas qu’ils ont compris les explications du Christ. Ils restent lents à croire.

v. 28-29. A l’approche de leur destination, l’heure des adieux arrive. Les propos de Jésus les ont ébranlés, alors, ils lui proposent de rester avec eux.

– L’événement décisif v.30-32.

Jésus, l’invité, devient le maître de maison puisqu’il prononce la prière et partage le pain suivant la coutume des repas juifs.

Pour décrire l’action de Jésus au v. 30 Luc utilise les quatre verbes du récit de la Cène en Luc 22, 19 présents aussi dans tous les récits du dernier repas de Jésus avec ses disciples : « Prendre, bénir, rompre, donner ». Ils sont repris dans toutes les célébrations eucharistiques. Aujourd’hui encore, lorsque le prêtre prononce ces paroles dites par Jésus, c’est le Seigneur lui-même qui s’adresse à nous, à tous les chrétiens présents. En Luc 22, 19 Jésus donne le pain rompu en disant « Ceci est mon corps ». Aujourd’hui encore, le chrétien qui mange ce pain, s’incorpore au corps du Christ qui est présent au milieu de son Eglise.

Cléophas et son ami ont certainement mangé le pain rompu donné par Jésus. C’est pourquoi au V 31 : « Leurs yeux s’ouvrirent ». Cette reconnaissance parait naturelle. Il est présent puisqu’ils le reconnurent, mais il a disparu. Leurs yeux s’ouvrent sur un vide, un vide qui est plein de sa présence. Jésus n’est pas un simple revenant. En effet, Luc ne nous dit pas qu’ils l’ont vu, mais « reconnu » au v. 31. Il y a continuité entre le Jésus historique et Christ ressuscité, mais en même temps, discontinuité puisqu’il est entré dans la gloire du v. 26.

Ils reconnaissent sa présence. Comment en parlent-ils ?

v. 32 « Notre cœur n’était-il pas brûlant » : il s’agit d’une présence intérieure qui irradie, réconforte, transforme le cœur, l’intelligence, tout l’être.

Saint Paul écrit «  Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est Christ qui vit en moi » Gal 2, 20.

– Conséquences de cet événement v.33-35.

« A l’instant même », c’est à dire ce même jour de Pâques, « ils se levèrent » : Ce verbe en grec est aussi utilisé pour dire que Jésus s’est levé d’entre les morts, est ressuscité. Ils retournent à Jérusalem, centre de l’histoire du Salut : de la Passion et de la Résurrection, et retrouvent la première communauté des croyants : les onze apôtres et leurs compagnons qui proclament la bonne nouvelle au v. 34. La Pâque du Christ est devenue leur Pâque.

V. 35, En parfaits croyants ils ne peuvent que témoigner des changements opérés dans leur vie.

Nos célébrations eucharistiques utilisent le même schéma que ce récit :

 Des chrétiens se rassemblent en Eglise. Dieu leur parle dans l’Ecriture. Comme le Christ, le célébrant actualise et explique cette Parole. Affermis dans leur foi qu’ils confessent, les chrétiens communient au Corps et au sang du Christ avant de repartir témoigner par leur vie et leurs paroles.

Ce chemin, celui d’Emmaüs, s’offre à chacun de nous. Jésus ressuscité se fait compagnon de voyage pour rallumer dans nos cœurs la chaleur de la foi et de l’espérance et rompre le pain de la vie éternelle. Comme ces deux disciples, nous sommes parfois découragés, triste, nous nous sentons seuls, abandonnés par le Seigneur. Mais notre chemin de vie peut devenir une purification et une maturation de notre croire en Dieu. Nous pouvons dialoguer avec Jésus en écoutant Sa Parole. Aujourd’hui encore, Il rompt le pain pour nous et se donne Lui-même comme notre Pain. Et ainsi la rencontre avec le Christ Ressuscité, nous donne une foi plus profonde et authentique, plus forte puisqu’elle se nourrit de la Parole de Dieu et de sa présence réelle dans l’Eucharistie.

« Sans te voir, nous t’aimons ; sans te voir, nous croyons, et nous exultons de joie, Seigneur, nous croyons en toi. »

Texte de Luc 24, 13-35

13 Le même jour (c’est à dire le premier jour de la semaine), deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem,

14 et ils parlaient entre eux de tout ce qui s’était passé.

15 Or, tandis qu’ils s’entretenaient et s’interrogeaient, Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux.

16 Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.

17 Jésus leur dit : « De quoi discutez-vous en marchant ? » Alors, ils s’arrêtèrent, tout tristes.

18 L’un des deux, nommé Cléophas, lui répondit : « Tu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci. »

19 Il leur dit : « Quels événements ? » Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme qui était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple :

20 comment les grands prêtres et nos chefs l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié.

21 Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. Mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé.

22 À vrai dire, des femmes de notre groupe nous ont remplis de stupeur. Quand, dès l’aurore, elles sont allées au tombeau,

23 elles n’ont pas trouvé son corps ; elles sont venues nous dire qu’elles avaient même eu une vision : des anges, qui disaient qu’il est vivant.

24 Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu. »

25 Il leur dit alors : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit !

26 Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? »

27 Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait.

28 Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient, Jésus fit semblant d’aller plus loin.

29 Mais ils s’efforcèrent de le retenir : « Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse. » Il entra donc pour rester avec eux.

30 Quand il fut à table avec eux, ayant pris le pain, il prononça la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna.

31 Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards.

32 Ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? »

33 À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. Ils y trouvèrent réunis les onze Apôtres et leurs compagnons, qui leur dirent :

34 « Le Seigneur est réellement ressuscité : il est apparu à Simon-Pierre. »

35 À leur tour, ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain.