Dimanche 12 septembre 2021
24è dimanche du temps ordinaire
Evangile selon saint Marc 8, 27-35
« Pour vous, qui suis-je » ?
Depuis deux mille ans la question nous est posée. Que signifie être disciple, se dire chrétien ? Quelles sont les conditions à remplir pour suivre Jésus sur le chemin de la vie, de notre vie ? L’évangile de ce dimanche apporte des réponses qui peuvent à première vue nous paraître rudes. Ces versets se situent au centre de l’évangile de Marc, juste avant la Transfiguration.
1 Qui suis-je ?
Marc v. 27 insiste sur le cheminement de Jésus. « Chemin faisant », il demande aux disciples ce que disent les gens à son propos. Les figures évoquées au v. 28 « Jean le Baptiste ; Élie ; un des prophètes », appartiennent à l’histoire, au passé d’Israël. Au v. 29 Jésus relance l’interrogation : « Pour vous qui suis-je ? ». Pierre, porte-parole du groupe, confesse qu’il est le Christ, le Messie, c’est à dire celui qui est attendu par les juifs pour libérer le peuple de l’envahisseur et restaurer le règne davidique. Ce Messie comblera l’espérance et les attentes du peuple.
Au v.30, nous sommes surpris : au lieu de féliciter Pierre pour sa perspicacité, Jésus les enjoint tous sévèrement de se taire. Pourquoi ?
2 L’enseignement de Jésus aux disciples
Sa réponse au v. 31 est très claire : il passe directement de la figure juive du Messie, fils de David, à celle du « Fils de l’homme » c’est à dire « fils d’Adam ». Il se reconnaît homme et Fils : il n’est pas à l’origine de son être mais reçoit la vie du Père, qui n’est qu’amour et pardon, et Jésus inscrit toute sa vie dans cette filiation. La principale activité de son Père réside dans le don de tout son amour aux hommes, et dans le respect de leur liberté. L’heureuse annonce de cette Bonne Nouvelle par Jésus devient rapidement mal venue et dramatique car elle met en question les élites politiques et religieuses qui exercent un pouvoir délictueux. En conséquence, elles le rejettent et cherchent par n’importe quel moyen à le faire taire.
Pour être fidèle au Père et vivre une vie de Fils, Jésus doit accepter ce rejet : « Il fallait » accepter la souffrance et témoigner jusqu’au bout, de l’amour et du pardon du Père aux coupables. Dans l’évangile de Marc, le chemin de Jésus est une montée vers Jérusalem et le Calvaire. La résurrection du Christ manifestera toute la sollicitude du Père envers son Fils qui est resté fidèle jusqu’à la mort à sa mission de Fils : manifester l’amour de Dieu pour les hommes, quel qu’en soit le prix à payer.
Pierre, en bon juif, ne peut pas accepter une telle réponse qui s’oppose à sa conception du Messie toute humaine. Spontanément, nous aussi nous voudrions un Messie sans la Passion.
Au v.33 Jésus renvoie Pierre à sa condition de disciple : il ne doit pas prendre Jésus à part, mais rester derrière, le suivre sur le chemin avec ses compagnons.
Jésus révèle à tous, « la foule avec ses disciples », les enjeux de cette algarade : En appelant Pierre Satan, Jésus dit que son attitude et ses propos s’opposent au dessein de Dieu.
Parce qu’il avait résisté aux sollicitations de Satan au désert, il avait été qualifié de « Fils bien aimé » du Père (Mc 1, 11). Pierre reste au niveau purement humain des illusions de l’attente messianique. Il ne comprendra qu’après l’avoir renié en Mc 14, 72.
3 L’explication pour tout homme : Comment être disciple, comment sauver sa vie ?
Au v. 34, Jésus élargit son auditoire à la foule car son enseignement nous concerne aussi, chacun personnellement : « Si quelqu’un ». A chacun de décider s’il veut marcher à sa suite, c’est à dire devenir disciple. Pour cela deux exigences sont nécessaires :
– Renoncer à soi-même : renoncer à choisir sa propre manière de suivre, c’est à dire prendre conscience de ce qui anime notre existence, et renoncer à l’image idéale de soi que l’on voudrait réaliser. C’est aussi nous libérer des pièges d’une éthique mondaine, « qu’il prenne sa croix et qu’il me suive » sur le chemin de la vraie vie, enfin, c’est s’accomplir en restant fidèle au Christ.
– Prendre sa croix : accepter, assumer tout ce qui nous arrive de pénible, de douloureux. Le malheur peut faire partie du chemin de vie que j’ai choisi et je dois l’accepter, à l’imitation du Christ rejeté par la société. Accepter et assumer le malheur, c’est, comme le Crucifié, faire confiance à l’amour de Dieu, comprendre que notre être en devenir se réalisera pleinement « le 3° jour ».
Suit l’explication de cet appel au v. 35 : Il ne s’agit pas de perdre pour retrouver, mais de « perdre » pour « sauver sa vie ». En effet, le but de la vie n’est pas de réaliser à tout prix son idéal pour avoir la vie dont on rêve, par exemple la richesse, ou la puissance, et de les défendre contre toute menace. Comme Pierre, le rêveur enfermé dans cet idéal simplement humain et donc limité, ne peut pas s’ouvrir au devenir inconnu de la vie, une vie reconnue comme reçue du Père. Prisonnier de ce qu’il connaît, il ne fait pas confiance, refuse les « il faut » des aléas de l’existence.
Sauver sa vie, adhérer à Jésus et à l’Evangile nous libère, nous ouvre un avenir inconnu. C’est pourquoi nous lui faisons confiance. Sa Parole nous transforme et nous façonne en un autre vivant plus humain et c’est l’œuvre de toute une vie.
On peut dire que le Salut est l’accomplissement heureux de l’être humain à la suite de Jésus.
« À ce monde que tu fais chaque jour avec tendresse
À ce monde où tu voudrais plus de joie, moins de détresse,
À ce monde qui renaît s’il a foi en ta promesse,
Donne un cœur de chair, donne un cœur nouveau.
Viennent les cieux nouveaux et la nouvelle terre que ta bonté nous donnera
Viennent les cieux nouveaux et la nouvelle terre où la justice habitera. »
Didier Rimaud.
Evangile selon saint Marc 8, 27-35
27 En ce temps là, Jésus s’en alla, ainsi que ses disciples, vers les villages situés aux environs de Césarée-de-Philippe. Chemin faisant, il interrogeait ses disciples : « Au dire des gens, qui suis-je ? »
28 Ils lui répondirent : « Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, un des prophètes. »
29 Et lui les interrogeait : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre, prenant la parole, lui dit : « Tu es le Christ. »
30 Alors, il leur défendit vivement de parler de lui à personne.
31 Il commença à leur enseigner qu’il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite.
32 Jésus disait cette parole ouvertement. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches.
33 Mais Jésus se retourna et, voyant ses disciples, il interpella vivement Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »
34 Appelant la foule avec ses disciples, il leur dit : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive.
35 Car celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera.