Commentaire d’évangile

Commentaire d’évangile

Dimanche 10 octobre
28ème dimanche du temps ordinaire

Evangile selon saint Marc (10, 17-30)

L’évangile de ce dimanche nous raconte la triste histoire d’une vocation manquée : un homme vient demander un conseil à Jésus pour réussir sa vie : Que faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? (V 17-22) et il repart tout triste.

Cette question existentielle taraude chacun de nous. La réponse de Jésus aux disciples les déroute (v 23-27), mais la question de Pierre lui permet de préciser la condition requise pour avoir la vie éternelle (v. 28-30).

V 17-22 : Jésus et l’homme.

L’homme voit en Jésus un « bon maître », qui connaît et obéit à la Loi, et on peut penser qu’il vient lui demander de se prononcer sur ce qui fait l’essentiel de la Loi de Moïse « pour avoir la vie éternelle en héritage ». Aussitôt Jésus oriente son regard vers l’Unique Dieu d’Israël : lui seul est Bon.

Dans sa question ce juif pieux insiste sur « que faire » pour « hériter » de la vie éternelle v. 17. En effet, s’il met en pratique tous les commandements, il aura droit à la vie éternelle : il est dans l’ordre du « donnant-donnant ». Dans sa réponse, Jésus bon connaisseur de la Loi, sélectionne les commandements qui concernent le prochain et les élargit à quiconque lorsqu’il ajoute au v. 19 « ne fait de tort à personne ».

L’homme qui pratique  « tout cela » v. 20, attend peut-être un satisfécit. V. 21 Jésus reconnaît sa droiture, sa fidélité religieuse, et instaure avec lui une relation personnelle : « Il posa son regard sur lui et l’aima». Toutefois, au lieu de le féliciter, il pointe un manque. Si l’homme est aimé par Jésus, ce n’est pas à cause de sa richesse morale et spirituelle. Jésus l’oriente vers une autre façon d’acquérir « un trésor dans le ciel » : « va, vends tout ce que tu as et donne-le aux pauvres…. Puis viens, suis-moi ». Il suffit de se défaire de ses biens pour suivre Jésus. L’enjeu de cette demande vise à transformer son interlocuteur : le dépouillement volontaire de son avoir lui permettrait d’entrer dans le domaine de la gratuité, du don.

La relation du « faire pour hériter » v. 17, sera dépassée par une relation avec Jésus. La vente des biens lui permettrait d’accéder au monde relationnel de la gratuité. Suivre la Loi ne suffit pas. Il faut se libérer de ses attaches pour se mettre en route et suivre le Christ. Avoir « un trésor au ciel » v. 21 c’est changer la nature de notre trésor.

En lui demandant de tout laisser pour le suivre, Jésus met en valeur l’originalité de la morale évangélique qui ne se réduit pas à des préceptes à observer. L’attachement à la personne du Christ demande un certain dépouillement : renoncer par exemple à la gloire et à la réussite humaine. Le drame est que cet homme, qui est déjà un bon juif, n’est pas prêt à se lancer vers l’inconnu de la gratuité, il n’est pas prêt pour une relation basée sur la confiance, pour répondre à la quête d’amour de Jésus.

V 22 il « s’en alla tout triste » : il rentre chez lui. Cependant, entre le moment où il va vers Jésus et le moment où il repart vers ses biens, un changement s’est opéré en lui. La tristesse est le signe que sa satisfaction tranquille, son observance des commandements sont dérangés par la Parole de Jésus. Peut-être pourra-t-elle un jour le sauver ?

V 23-27 : Qui peut entrer dans le royaume de Dieu ?

Le regard de Jésus s’élargit et s’adresse aux disciples. Il insiste sur la difficulté pour les riches d’entrer dans le royaume. Or à cette époque les richesses sont considérées comme une bénédiction divine. Et Jésus affirme que nul ne peut compter sur son avoir ou son pouvoir pour y entrer.

Dans l’image proposée au v.25, le chameau doit absolument maigrir et devenir comme un fil pour passer dans le trou de l’aiguille, ce qui est naturellement impossible. Les disciples sont stupéfaits, déconcertés : v 26 « Qui peut être sauvé ? » Nous sommes attachés à notre confort, au pouvoir que nous exerçons, à notre indépendance etc… Au v 27 Jésus regarde son entourage pour affirmer « Tout est possible à Dieu ». Ainsi Dieu ne nous demande rien d’impossible, mais simplement de croire, de s’en remettre à lui. Il ne s’agit pas de savoir qui peut se sauver par ses propres forces, mais qui se défait de tous les obstacles qui l’empêchent de s’abandonner totalement à l’amour, à la puissance divine de salut. L’entrée dans la vie éternelle ne peut être qu’un don de Dieu qui nous aime et nous accueille.

La question « Qui peut être sauvé ? » reste sans réponse hors de la confiance, de la foi en Dieu « Bon ».

V 28-30 : La vie éternelle : une vie avec Dieu.

Pierre est révolté : Les disciples ont tout quitté pour le suivre, mais sont-ils sûrs d’être sauvés ?

Tout quitter peut cacher un subtile attachement au renoncement lui-même, et dans le secret du cœur on en reste à un « donnant-donnant » : en suivant Jésus, je suis sûr d’être sauvé. Nous devons tout quitter sans aucune garantie ni assurance, d’une certaine manière en pure perte, comme Jésus qui est allé jusqu’au bout de son amour pour le Père, jusqu’à la Passion et la Croix : Il a tout donné, s’est abandonné, et son Père l’a relevé d’entre les morts. Toute vie chrétienne est une Pâque, chacun peut y participer à sa mesure car il est aimé de Dieu.

Jésus, dont le regard ne peut être que de tendresse, l’affirme solennellement au v. 29, pour recevoir la vie éternelle il suffit de s’attacher à sa personne, de vivre l’Evangile avec passion, même si c’est au prix d’une insatisfaction du désir de « voir » Dieu sans jamais y parvenir. Mais c’est dans ce manque, ce désir, que réside sa présence au cœur de notre existence. Pour Grégoire de Nysse : « C’est en cela que consiste la véritable vision de Dieu, dans le fait que celui qui lève les yeux vers lui ne cesse de le désirer. »

« En accueillant l’amour de Jésus Christ, nous avons tout reçu des mains du Père.

Et nous aurons la joie de partager le pain avec les pauvres de la terre. »

CFC (s. Marie-Pierre)

Evangile de Marc 10, 17-30

17 En ce temps là, Jésus se mettait en route quand un homme accourut et, tombant à ses genoux, lui demanda : « Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? »

18 Jésus lui dit : « Pourquoi dire que je suis bon ? Personne n’est bon, sinon Dieu seul.

19 Tu connais les commandements : Ne commets pas de meurtre, ne commets pas d’adultère, ne commets pas de vol, ne porte pas de faux témoignage, ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère. »

20 L’homme répondit : « Maître, tout cela, je l’ai observé depuis ma jeunesse. »

21 Jésus posa son regard sur lui, et il l’aima. Il lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; alors tu auras un trésor au ciel. Puis viens, suis-moi. »

22 Mais lui, à ces mots, devint sombre et s’en alla tout triste, car il avait de grands biens.

23 Alors Jésus regarda autour de lui et dit à ses disciples : « Comme il sera difficile à ceux qui possèdent des richesses d’entrer dans le royaume de Dieu ! »

24 Les disciples étaient stupéfaits de ces paroles. Jésus reprenant la parole leur dit : « Mes enfants, comme il est difficile d’entrer dans le royaume de Dieu !

25 Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu. »

26 De plus en plus déconcertés, les disciples se demandaient entre eux : « Mais alors, qui peut être sauvé ? »

27 Jésus les regarde et dit : « Pour les hommes, c’est impossible, mais pas pour Dieu ; car tout est possible à Dieu. »

28 Pierre se mit à dire à Jésus : « Voici que nous avons tout quitté pour te suivre. »

29 Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre

30 sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle.