Commentaire d’évangile

Commentaire d’évangile

Dimanche 30 janvier
4ème dimanche du temps ordinaire

Ces versets suivent et complètent ceux que nous avons entendus dimanche dernier. Ils débutaient la lecture continue de l’évangile de Luc que nous écouterons pendant cette année liturgique.

Dans ce récit situé au début de sa vie publique, Luc nous présente l’opposition que Jésus va rencontrer tout au long de sa mission. Pourtant tout semble avoir bien commencé, mais après l’enthousiasme du v. 22 pourquoi cette haine ? Il semblerait que Jésus ait pris un malin plaisir à se mettre ses contemporains à dos. Comment pouvons-vous expliquer sa réaction, est-elle toujours d’actualité ?

Réaction de l’auditoire

V.21, après avoir lu un passage du prophète Isaïe, Jésus le commente : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture». La parole de Dieu contenue dans l’Ecriture prend tout son sens et devient événement dans la bouche et dans toute la vie de Jésus. Le passé de l’histoire d’Israël éclaire l’ensemble de son être. La grâce de Dieu se reflète à travers lui, c’est pourquoi au v. 22 « tous lui rendaient témoignage ».

Ses auditeurs sont unanimes à reconnaître les « paroles de grâce qui sortaient de sa bouche » : pour nous aussi, Jésus est « l’aujourd’hui » de cette grâce.

Mais aussitôt le doute s’insinue. Il est connu de tous les habitants du village, on connaît ses parents : « N’est-ce pas là le fils de Joseph ? » Comment cette personne de modeste extraction peut-elle parler ainsi et avoir de merveilleux pouvoirs ? « Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm »  Leur question montre qu’ils ont perçu le décalage entre son message qui atteste son identité prophétique et son origine humble. Ne nous arrive-t-il pas d’enfermer une personne dans ce que nous savons d’elle ? « Oh, je la connais, elle est incapable de faire telle chose » Ainsi, comme les nazaréens, on ferme tout avenir nouveau à cette personne en la réduisant à ce que nous savons d’elle, et finalement en la dévalorisant.

Réaction de Jésus

Au v. 23 Il ne répond pas à la question de son origine mais se lance dans un surprenant monologue, parle à la place de ses interlocuteurs, exprime leur désir informulé d’avoir des guérisons à l’aide d’un dicton ironique. Il paraît normal aux nazaréens que Jésus intervienne à leur profit mais au v. 24 Jésus leur fait comprendre leur erreur en prononçant un oracle qui nous révèle le conflit naissant entre la volonté de Dieu et la volonté humaine de ses concitoyens. En même temps, il nous donne une clé de vérification de sa vocation prophétique : Un vrai prophète est rejeté.

Les v. 25-26 précisent sa pensée avec solennité et autorité : « En vérité, je vous le dis ». Le recours à l’Ecriture lui permet de préciser quel sera le contenu de son ministère. Les grands prophètes Elie et Elisée n’ont pas agi en faveur d’Israélites mais en faveur d’étrangers à l’Alliance. La pauvre veuve de Sarepta et le lépreux syrien représentent les malheureux et les opprimés dont la libération est annoncée dans la lecture du livre du prophète Isaïe mentionnée au v. 21. Cette nouvelle du salut n’est plus réservée à Israël mais ouverte à tous puisque ces prophètes ont guéri des non juifs.

Retournement des nazaréens

Au v. 28 ils ont très bien compris que les paroles de Jésus leurs sont adressées. En tant que peuple élu, un prophète, un envoyé de Dieu, ne peut qu’agir exclusivement en leur faveur, donc Jésus n’est qu’un imposteur et doit être supprimé. Ils sont indignés, furieux, ce faisant ils s’excluent eux-mêmes de la Bonne Nouvelle du Salut. Leur réaction au v. 29 vérifie le dicton du v. 24 sur le rejet du vrai prophète.

Jésus lève toute ambiguïté sur le sens de sa mission. Les juifs attendaient un messie politico-religieux pour restaurer leur statut de peuple élu héritier des promesses, libéré de l’occupation romaine. Leur privilège de peuple élu est battu en brèche par la mission universelle de Jésus. Personne ne peut revendiquer un traitement de faveur. Ils refusent de passer d’un Dieu national, lié à Israël par un contrat d’alliance, à un Dieu universel, Père de tous les humains. On ne peut pas s’approprier Dieu.

Pourquoi l’évangéliste a-t-il placé ce récit au début de la vie publique de Jésus ?

Cette scène est un abrégé de toute la vie publique de Jésus.

Les v. 29-30 annoncent la fin de l’évangile. Cette première tentative de meurtre fait allusion au déroulement de la Passion : ils le « poussent hors de la ville ». Le modeste village de Nazareth blotti dans une vallée est devenu une ville située sur une colline puisqu’ils « le menèrent jusqu’à un escarpement pour le précipiter en bas ». Cette description convient bien à Jérusalem puisque le Golgotha est situé en dehors de la ville.

Jésus recourt aux Ecritures pour montrer la cohérence du dessein divin. Elles permettent de comprendre son destin. Il est l’envoyé du Père qui accomplit l’Ecriture. Luc nous invite à un va et vient entre l’Ecriture et la vie de Jésus, entre l’Ecriture accomplie en Jésus et notre vie. Les événements du passé permettent de savoir qui est Jésus. « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture » v.21. Jésus en est bien l’herméneute par excellence. Il annonce dans sa personne que Dieu s’intéresse à la vie de tous les humains, à la vie de chacun de nous aujourd’hui.

« Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin » v. 30. Ce verset annonce le moment décisif et solennel où Jésus commence son voyage vers Jérusalem. La résurrection sera le dernier mot de Dieu son Père. Personne, pas même la mort ne pourra retenir captif celui qui est habité par l’Esprit de Dieu mentionné dans le passage du prophète Isaïe lu par Jésus.

« Les mots que tu nous dis surprennent nos attentes,

Mais qui es-tu Jésus, pour nous parler ainsi?

Sont-ils « Bonne Nouvelle » qui changera nos vies?

Tu es celui qui vient pour libérer nos vies! »

Claude DUCHESNEAU

Evangile de Luc 4, 21-30

21 En ce temps-là, dans la synagogue de Nazareth, après la lecture du livre d’Isaïe, Jésus déclara :

« Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. »

22 Tous lui rendaient témoignage et s’étonnaient des paroles de grâce qui sortaient de sa bouche. Ils se disaient : « N’est-ce pas là le fils de Joseph ? »

23 Mais il leur dit : « Sûrement vous allez me citer le dicton : “Médecin, guéris-toi toi-même”, et me dire : “Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm ; fais donc de même ici dans ton lieu d’origine !” »

24 Puis il ajouta : « Amen, je vous le dis : aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays.

25 En vérité, je vous le dis : Au temps du prophète Élie, lorsque pendant trois ans et demi le ciel retint la pluie, et qu’une grande famine se produisit sur toute la terre, il y avait beaucoup de veuves en Israël ;

26 pourtant Élie ne fut envoyé vers aucune d’entre elles, mais bien dans la ville de Sarepta, au pays de Sidon, chez une veuve étrangère.

27 Au temps du prophète Élisée, il y avait beaucoup de lépreux en Israël ; et aucun d’eux n’a été purifié, mais bien Naaman le Syrien. »

28 À ces mots, dans la synagogue, tous devinrent furieux.

29 Ils se levèrent, poussèrent Jésus hors de la ville, et le menèrent jusqu’à un escarpement de la colline où leur ville est construite, pour le précipiter en bas.

30 Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin.