Commentaire d’évangile

Commentaire d’évangile

Dimanche 10 avril
dimanche des rameaux

Evangile selon St Luc 22, 14-25,56 

Chaque année, nous lisons pendant le dimanche des rameaux un récit de la Passion. Les trois derniers jours de la vie de Jésus sont racontés avec bien plus de détails que les trois ans de sa vie publique car cette Passion librement consentie donne tout son poids et tout son sens à sa vie. On lit ce récit dans les quatre évangiles, mais chaque rédacteur raconte ces mêmes événements en fonction de sa sensibilité et en fonction de la communauté à laquelle il s’adresse.

Cette année, nous lisons la Passion selon Saint Luc. Nous ne retiendrons que quelques épisodes propres à son évangile, significatifs des aspects du visage de Jésus qu’il souhaite mettre en valeur.

Jésus veut faire la volonté de son Père jusqu’au bout.

Au mont des Oliviers en 22, 39-46, Jésus découragé, tenté de tout abandonner a peur de la mort. « Pris d’angoisse il priait plus instamment et sa sueur devint comme des caillots de sang qui tombaient à terre. » Il souhaite éviter l’épreuve, ne pas aller au bout de sa mission, « Père, si tu veux écarter de moi cette coupe. Pourtant, que ce ne soit pas ma volonté mais la tienne qui se réalise. » Pour ne pas céder à la tentation, il reste en relation avec son père : on compte cinq emplois du verbe prier. L’apparition bienfaisante de l’ange lui communique la force divine, signe que Dieu ne l’abandonne pas.

Parce que Jésus a confiance en son Père et veut faire sa volonté, Luc souligne sa bonté malgré l’épreuve : Au moment de son arrestation, il recolle l’oreille du serviteur du grand prêtre en 22, 17. Son regard plein de bonté posé sur Pierre qui vient de le renier en 22, 61 pourra l’aider plus tard à se repentir.

Crucifié avec deux malfaiteurs, il accomplit jusqu’au bout la volonté du Père de sauver ceux qui étaient perdus. « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font » 22, 34 : au moment où ils le mettent à mort, au lieu de les maudire, Jésus intercède pour eux auprès de son père. Sa passion devient source de pardon de notre péché et nous dévoile jusqu’où va son amour pour nous.

Jésus est le juste condamné.

Luc insiste sur son l’innocence. Au cours du procès officiel politique, « tous ensemble » 23, 1 ils l’accusent injustement de façon à le faire condamner : « les grands prêtres et les scribes l’accusaient avec violence » en 23, 10. Mais quatre fois en 23, 4 ; 14 ; 15 ; 22, Pilate le déclare innocent « Je ne trouve rien qui mérite condamnation en cet homme». Ayant saisi l’enjeu des accusations il  l’envoie chez Hérode qui le traite avec mépris et se moque de lui, mais lui non plus, ne prononce aucune sentence de condamnation en 23, 15. Ce jour là, Pilate et Hérode devinrent amis. On peut dire que Jésus, reconnu innocent explicitement par Pilate et implicitement par Hérode, fut condamné sans jugement par un pouvoir qui démissionne face aux pressions.

Le mensonge politique des accusateurs est dévoilé de façon très ironique lorsqu’au v 18 « Ils s’écrièrent tous ensemble ‘supprime-le et relâche-nous Barabas’ » La foule veut la mort d’un homme qu’elle accuse d’être un d’agitateur alors qu’elle-même, très agitée se trouve au bord de la révolte et réclame la liberté pour un agitateur assassin. Pilate qui a peur d’une émeute abdique « Quant à Jésus, il le livra à leur volonté » 23, 25.

La montée vers le Calvaire ressemble à une longue procession. Jésus en tête « était suivi d’une grande multitude du peuple, entre autres de femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. Jésus se tourna vers elles et leur dit : ‘Filles de Jérusalem ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes’ » 23, 27. Dans cette ultime montée, Jésus le juste, refuse de s’apitoyer sur son propre sort pour, dans un ultime élan d’amour, encourager le peuple à regarder en face sa propre situation pécheresse. Les pleurs sont le commencement de la sagesse, le début de la crainte de Dieu, un début de conversion.

Enfin, le centurion qui constate la mort de Jésus, « rend gloire à Dieu en disant ‘Sûrement cet homme était juste’ » en 23, 47.

Pour l’évangéliste il est fondamental de nous faire comprendre que Jésus est Le juste persécuté et mis à mort.

Jésus fait totalement confiance à son père.

L’un des deux larrons crucifiés avec lui l’insulte, tandis que l’autre lui répond « tu n’as même pas la crainte de Dieu, toi qui subis la même peine ! Pour nous, c’est juste : nous recevons ce que nos actes ont mérité ; mais lui n’a rien fait de mal » 23, 40-41. Ce malfaiteur qui reconnaît la messianité du Juste s’adresse humblement à lui, l’appelle au secours, il a foi en sa justice : « Souviens-toi de moi quand tu viendras comme roi » v 42. Jésus qui fait totalement et aveuglément confiance à son père lui répond solennellement : « En vérité, je te le dis, aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis » v 43. Au seuil de la mort, Jésus lui ouvre une perspective d’espérance et de vie, il accueille ce malfaiteur qui reconnaît son péché. Il vivra « avec lui » et sera sauvé.

Au moment de sa mort dans un ultime cri de confiance il dit « Père, entre tes mains, je remets mon esprit » v 46. La mort de Jésus est un acte de communion d’amour. Après avoir vécu toute sa vie uni à son Père par la prière, maintenant dans l’angoisse de Gethsémani et les tourments de la crucifixion, il lui donne sa vie en toute confiance. Malmené par les humains, Jésus garde le contrôle de sa destinée. Comme tout homme, Il n’a pas le pouvoir d’échapper à la mort, mais il possède celui de l’affronter en faisant don de sa vie à son père bien aimé.

Le Juste persécuté resté fidèle à Dieu est un modèle à suivre pour le croyant.

Comme Jésus à Gethsémani nous devons prier, rester confiants dans les heures les plus sombres, et même à l’heure de notre mort. N’hésitons pas à mettre notre vie dans la main de Dieu.

Simon de Cyrène chargé de la croix derrière Jésus en 23, 26, peut être vu comme le type du disciple, c’est à dire du croyant, qui doit « porter sa croix », tous les événements douloureux de la vie, à la suite du Christ.

Nous assistons à un long pèlerinage vers la vérité qui advient malgré les obstacles et la perversion. La Passion est l’effort suprême du mal contre le dessein de Dieu, le triomphe passager de Satan : « C’est maintenant votre heure, c’est le pouvoir des ténèbres. » 22, 53. Au cours des procès religieux devant le Sanhédrin, et politique chez Pilate, tous sont contre Jésus et réclament sa mort. Les mensonges, accusations, moqueries pullulent. Au milieu de ce cloaque émerge peu à peu la vérité.

Au  fur et à mesure de la montée vers le Calvaire, les femmes et le peuple se repentent déjà, tous reconnaissent son innocence. La vérité éclate au moment de sa mort : son acceptation de la volonté du Père auquel il remet sa vie est déjà un passage dans la Gloire.

Ce récit s’achève sur une note de paix et de lumière : en 23, 56 les femmes préparent les aromates et les parfums en prévision de la Pâque : jour de la Nouvelle Création, jour de notre renaissance en Christ.

Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.

Quand domine la haine, que nous annoncions l’amour.

Quand blesse l’offense, que nous apportions le pardon.

Quand pèse la détresse, que nous ranimions l’espérance.

Gélineau.