Commentaire d’évangile

Commentaire d’évangile

Dimanche 18 septembre
25ème dimanche du temps ordinaire

Evangile selon saint Luc 16, 1-13

Parmi toutes les paraboles racontées par Jésus, celle d’aujourd’hui nous laisse bien perplexe. N’incite-t-elle pas à des conduites malhonnêtes, ou bien, Jésus ne provoque-t-il pas les disciples pour les faire réagir ? Comment l’employeur de notre récit, « Un homme riche », peut-il faire l’éloge de son employé, gérant escroc avéré et faussaire en écritures ?

Ce gérant malhonnête démasqué doit rendre les comptes de sa gestion à son maître avant d’être renvoyé. Au lieu de paniquer, il réfléchit et pense à deux solutions possibles : soit se retrouver chômeur sans aucun revenu, soit réduire les sommes dues par les débiteurs de son employeur, ce qu’il fait.

Conclusion de la parabole au v. 8a « le maitre fit l’éloge de ce gérant malhonnête car il avait agi avec habileté ». Heureusement, l’évangéliste Luc nous donne aussitôt quelques clés de lecture à partir du v. 8b.

« Les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière » v. 8

Les nombreux scandales qui marquent notre époque, nous sensibilisent au sens de cette parabole. L’homme riche ne fait preuve d’aucun discernement moral. Spécialiste en business, il méprise l’honnêteté et admire l’habileté de son gérant qui s’est joué de lui à seule fin de s’enrichir à ses dépends. Le gérant a su affronter avec intelligence son avenir incertain et a pris des décisions appropriées. En réduisant leurs dettes, il a fait en sorte que les débiteurs de son maître lui soient redevables, afin qu’ensuite ils puissent l’aider.

Le croyant « fils de la lumière » doit avoir à l’esprit que son avenir ne se termine pas à la mort mais se déploiera « dans les demeures éternelles » v. 9. Il doit faire preuve de la même ingéniosité et prévoyance  que les fils de ce monde tout en sachant qu’à heure de sa mort, l’argent ne vaut plus rien, et qu’il devra rendre des comptes à Dieu, source de vie : comment avons-nous géré cette vie, en « fils de ce monde » ou en « fils de la lumière » ?

« Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête » v. 9.

« Argent » traduit le terme « Mâmmon » qui signifie la richesse matérielle personnifiée en divinité. Certains cherchent uniquement à posséder de grands biens qui procurent la sécurité d’une vie confortable et agréable. L’argent idolâtré occupe leur pensée et donne sens à leur vie, en est le but. Il faut en gagner le plus possible, peu importent les méthodes utilisées, peu importe si c’est au détriment des autres. Alors, il devient une puissance aveugle, source d’injustice et d’oppression. Cet argent est trompeur, « malhonnête » : l’homme riche floué, bon perdant dépourvu de sens moral, loue l’habileté de son gérant.

Ce dernier a compris que l’argent n’est qu’un moyen. Il se montre généreux avec celui de son maître pour se faire des amis susceptibles de l’accueillir, de l’héberger et de le nourrir lorsqu’il sera dans la détresse. En donnant cet argent qui ne lui appartient pas, il sécurise son avenir. En cela, il s’est montré habile.

La situation de ce gérant est aussi la nôtre. En effet,  les « fils de la lumière », c’est à dire les disciples, doivent gérer avec sagesse et habileté les biens confiés par Dieu afin de vivre un jour auprès de lui dans les « demeures éternelles ». Nous ne sommes que les gérants des biens de ce monde : « Le Seigneur Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour cultiver le sol et le garder » Gen. 2, 15. Dieu le premier, fait confiance à l’homme pour garder ce jardin habité par nos frères humains. Il ne nous appartient pas. Nous n’avons ni le droit de tout garder pour nous, ni le droit de gaspiller pour notre seul plaisir. Ce serait insulter ceux qui ne possèdent rien.

A quelle condition serons-nous accueillis dans les demeures éternelles ?

« Aucun domestique ne peut servir deux maîtres » v. 13. Nous devons opter soit en faveur de Mâmmon, soit en faveur du Christ. Toute la vie du disciple tend et tente de faire sa volonté : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le pour eux ». Cette maxime de Mt. 5, 12 nous donne le fondement de la justice divine qui nous ouvrira les portes des « demeures éternelle ». L’économie divine fonctionne selon le régime de la gratuité, du don. Se faire des amis est un appel à aller vers les autres, et en particulier vers ceux qui n’ont rien, à l’imitation du Christ qui nous a tout donné, jusqu’à sa propre vie pour nous sauver.

Avoir un juste rapport à l’argent, c’est savoir l’utiliser, non pour le thésauriser ou simplement le multiplier, mais pour le mettre au service de nos frères démunis. « Faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour, alors votre récompense sera grande » Lc. 6, 35.

La parabole résume l’enseignement de Jésus sur l’argent Elle nous invite à mettre en cohérence notre foi, le sens de notre vie avec la promesse divine.

« Ouvre mes mains, Seigneur, qui se ferment pour tout garder,

Le pauvre a faim devant ma maison : apprends-moi à partager ! »

 M. Scouarnec